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Pertes record pour le géant du nucléaire français Areva

La firme annoncera le 4 mars un trou de 4,9 milliards d’euros

Richard Werly, Paris,

Article publié dans

Le Temps, Genève, 24 février 2015

 

La filière nucléaire française doit-elle être auditée et repensée de fond en comble ? Sur le plan comptable en tout cas, l’avertissement lancé lundi par Areva d’une perte de 4,9 milliards d’euros pour 2014 semble assuré de relancer les appels au grand ménage dans ce secteur éminemment stratégique.

Contrôlé par l’Etat à 85,6%, le géant français, fort de plus de 45 000 employés et d’environ 250 filiales dans une quarantaine de pays, devrait confirmer le 4 mars ces pertes nettes, supérieures à sa capitalisation boursière et légèrement inférieures à son chiffre d’affaires 2014 de 5,5 milliards d’euros. Cette bombe financière intervient après des années d’accusations portées contre la gestion d’Anne Lauvergeon, l’ancienne conseillère diplomatique de François Mitterrand, qui dirigea l’entreprise de 1999 (Areva a remplacé la Cogema en 2001) à 2011. Cette dernière, qui exerça jusqu’en février 2014 la présidence du Conseil de surveillance du quotidien Libération, avait été remplacée par Luc Oursel, décédé le 3 décembre 2014. Ses deux principaux dirigeants, le président du conseil d’administration, Philippe Varin, et le directeur général, Philippe Knoche, semblent donc avoir opté, dès leur entrée en fonction, pour une très douloureuse opération vérité. Il s’agit de la quatrième perte consécutive pour Areva.

Dérapages des chantiers

L’origine des pertes colossales d’Areva, héritière du fameux Commissariat à l’énergie atomique, est essentiellement liée aux dérapages des principaux chantiers dans lesquels ce constructeur de centrales nucléaires est engagé en France (Flamanville), en Finlande (où elle construit un réacteur de troisième génération qui coûtera 6 milliards au lieu des 3 milliards prévus) et au Japon, où l’accident nucléaire de Fukushima a «tué» son juteux marché. La firme française avait aussi raté, en 2006, le «contrat du siècle en Chine», où la construction de quatre réacteurs de troisième génération avait été remportée par l’américain Westinghouse. Autre boulet, de loin le plus explosif: le fameux rachat pour près de 2 milliards d’euros de la société canadienne Uramin en 2007, dont les gisements d’uranium au Niger étaient un mirage.

Cet exercice désastreux devrait relancer les spéculations sur un possible rapprochement entre EDF (contrôlé par l’Etat français à hauteur de 84%) et Areva. La nécessité de regrouper les deux structures est jugée incontournable par les experts, dans un contexte de pétrole à bas prix et de contraintes réglementaires croissantes en faveur des renouvelables. Hier, l’action a perdu 2,09%.

 

 

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