Archives mensuelles : avril 2015

OBSTINATION NUCLEAIRE FRANÇAISE

Par
Philippe Bach
Editorial du journal Le Courrier,
Genève, du vendredi 17 avril 2015.

L’EPR (réacteur européen pressurisé) de Flamanville (département de la Manche) de nouveau sur la sellette. Mercredi – mais la nouvelle est restée plutôt discrète –, l’autorité de sûreté nucléaire française (ASN, le gendarme du nucléaire) a sifflé le hors-jeu de cette centrale en construction et qui incarne l’avenir du parc électro-nucléaire hexagonal.
Des «anomalies de fabrication» ont été découvertes sur la cuve de l’installation. C’est-à- dire là même où se produit la réaction nucléaire dégageant l’énergie qui est ensuite turbinée. Le président de l’ASN a enfoncé le clou en ne présageant «d’aucune manière de la décision qui sera prise, compte tenu de l’im- portance de l’anomalie que je qualifie de sérieuse, voire de très sérieuse1». En clair: la cuve – 425 tonnes tout de même – déjà installée se révèle moins résistante que prévue. Ce qui est évidemment gravissime pour un équipement qui sera soumis à des chocs thermiques importants.
Une nouvelle tuile pour EDF et Areva, qui chapeautent le nucléaire français. Le chantier de Flamanville accumule les retards. Alors que la centrale devait entrer en fonction en 2012,
elle est loin d’être achevée. Et la facture est déjà passée de 3,3 à 8,5 milliards d’euros!
Bref, on assiste à une nouvelle fuite en avant organisée par le tout-puissant lobby de l’atome français. Et François Hollande a beau promettre une réduction de la part du nucléaire dans la production électrique française de 75% à 50% à l’horizon 2025, on sait que l’inconsistant joueur de pipeau qui prend ces jours-ci des bains de foule à Ouchy excelle dans ce genre de promesses qui rendent les fous joyeux. La loi de transition énergétique votée en octobre dernier offre toutes sortes d’échappatoires. Dans la foulée, sa ministre de l’Ecologie conditionne la fermeture des plus vieilles et plus dangereuses centrales, comme celle de Fessenheim, au démarrage de Flamanville. En attendant, les vieilles casseroles sont priées de ne pas présenter de fuites.
Tout cela tient davantage du bricolage que de la politique. Ce qui est sans doute aussi vrai d’autres aspects de l’action gouvernementale française. Mais dans le cas d’espèce, cela concerne également les pays voisins directement menacés dans leur sécurité par cette obstination nucléaire.
1 Voir Le Monde du 15 avril.

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EPR Flamanville: une anomalie pourrait condamner le réacteur

9 avril 2015
L’anomalie signalée mardi par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) sur la cuve du réacteur nucléaire en construction à Flamanville (Manche) risque de condamner ce réacteur ainsi que deux autres EPR en chantier en Chine, affirme jeudi l’organisation écologiste Greenpeace.
« Si les tests en cours confirment l’anomalie –et il y a de fortes probabilités qu’ils la confirment– ces EPR sont condamnés à ne pas démarrer » car les cuves, dont l’acier fait l’objet de doutes, « sont a priori irremplaçables » une fois posées, a déclaré à l’AFP Yannick Rousselet, chargé des questions nucléaires à Greenpeace France.
« Jamais au monde pour le moment on a réextrait une cuve sans détruire tout ce qu’il y a autour », affirme M. Rousselet.
Interrogé par l’AFP, le service de communication d’EDF, maître d’œuvre du chantier de Flamanville, a indiqué ne faire « aucun commentaire ».
« Les enjeux sont considérables », ajoute M. Rousselet, pour qui il s’agit du plus gros problème jamais relevé sur un EPR (réacteur pressurisé européen).
Mardi, l’ASN a annoncé qu’une « anomalie » avait été détectée à Flamanville « dans la composition de l’acier du couvercle de la cuve, et du fond de cuve », deux pièces appelées calottes.
Outre Flamanville, trois réacteurs EPR sont en construction dans le monde, en Chine et en Finlande. Or « certaines calottes des cuves des réacteurs de Taïshan 1 et 2 (Chine) ont été fabriquées par Creusot Forge, filiale d’Areva, selon un procédé similaire à celui de la cuve de l’EPR de Flamanville », a précisé mercredi le gendarme du nucléaire dans un communiqué. Ce n’est pas le cas des calottes de la cuve de l’EPR d’Olkiluoto en Finlande, qui proviennent d’un autre fournisseur.
Areva doit réaliser d’ici octobre des expertises pour confirmer ou infirmer « l’anomalie » apparue au cours de « premières mesures ».

« Un couvercle de cuve, c’est des mois de fabrication, et des coûts astronomiques, donc ça pose un problème, mais c’est remplaçable. Mais les cuves c’est complètement inenvisageable », affirme le militant. Car « quand on pose une cuve, aussitôt on met une quantité d’éléments autour, y compris des éléments bétonnés pour la fixer », selon lui.
La cuve de Flamanville a été posée en janvier 2014 avant le démarrage de la centrale prévu en 2017. Celui de Taïshan 1 est annoncé pour fin 2015.
Selon Greenpeace, « la pièce étalon sur laquelle a été détectée l’anomalie est censée valider l’ensemble des calottes » fabriquées par Creusot Forge pour Flamanville et Taïshan, mais aussi pour des réacteurs qui ne sont pas encore commandés, comme Taïshan 3 et Hinkley Point (sud-ouest de l’Angleterre), pour lequel EDF n’a pas pris de décision définitive d’investissement.
Interrogée par l’AFP, Areva n’a « pas souhaité faire de commentaire ».
Selon Greenpeace, le géant du nucléaire, en difficultés financières, « a pris un risque industriel en décidant de faire une série de calottes » sur la base de ce même étalon.
« Sur le seul chantier EPR où Areva est maître d’œuvre, celui de Finlande, au lieu de faire les calottes en France, Areva les a fait faire par les Japonais et elles n’ont pas de problème », ajoute le militant de Greenpeace.
En 2014, Areva avait indiqué que la cuve de Flamanville avait été forgée à 80% chez Japan Steelworks et à 20% chez Areva au Creusot.
La cuve, qui pèse 425 tonnes et mesure 11 mètres de haut, est une pièce « particulièrement importante pour la sûreté » car elle « contient le combustible » et « participe à la seconde barrière de confinement de la radioactivité » après la gaine du combustible, selon l’ASN.

AFP

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