Internet coûte cher à la planète

ENERGIE

Surfer sur le web est une activité désormais anodine, mais pas sans conséquences sur la consommation électrique

par Vincent Bürgy

(Source : Le Courrier du 22 décembre 2015)

 

Les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) seraient à l’origine, selon différentes études, de 5 à 10 % de la consommation mondiale d’électricité. Qu’il s’agisse de l’envoi d’un courriel, du visionnage d’une vidéo sur son smartphone ou de visites sur les réseaux sociaux, toutes ces activités appartenant désormais au quotidien ont un coût écologique. Une considération qui échappe le plus souvent aux internautes.

«Il y a une forme de conscience diffuse de ces problèmes. Le public a notamment une certaine idée de la dangerosité des appareils électroniques puisqu’ils conservent chez eux une bonne partie de leurs anciens téléphones portables ou ordinateurs, sans les jeter», observe Michelle Dobré. Sociologue auprès de l’Université de Caen Normandie (France), celle-ci a cosigné plusieurs ouvrages et articles où il est notamment question de l’impact environnemental des NTIC, dont le livre «La face cachée du numérique» paru en 2013.

 

En dépit de l’importance croissante du numérique depuis les années 1990, les thèmes de la consommation énergétique de ces technologies et du traitement des déchets électroniques demeurent pourtant absents de l’espace médiatique. Michelle Dobré déclare que cela ne découle pas à proprement parler d’une négation des consommateurs ou des acteurs du domaine, mais que la réponse est à chercher ailleurs. La sociologue enchaîne: «Il y a un mythe contemporain selon lequel nous allons être sauvés par ces technologies. Une promesse qu’elles vont réparer les dégâts de la dernière ère industrielle.» Oubliées les survivances de la révolution industrielle, les nouvelles technologies se profilent même comme la clé de voûte du développement durable.

Cette doxa serait une manière d’occulter l’impact véritable de ces technologies, relève la chercheuse. En effet, rien que pour la France, les NTIC représentent 14% de la consommation électrique, soit près de sept réacteurs nucléaires, et sont à l’origine de 5% des émissions annuelles de gaz à effet de serre, indique un rapport de l’Etat français. Cette étude estime que la part croissante d’électricité utilisée par ces technologies a pour effet «d’annuler totalement les gains énergétiques obtenus sur tous les autres équipements énergétiques domestiques sur la même période».

 

Ce phénomène, nommé «effet rebond», vient également remettre en cause les supposées vertus écologiques d’internet. L’une des pierres angulaires de ce réseau, les data centers, ou centres de données sont particulièrement dans le collimateur des chercheurs. Ces «fermes de serveurs» hébergent des centaines de téraoctets de données. Celles-ci sont stockées dans d’innombrables serveurs qui constituent la partie visible d’internet. Différents services de stockage immatériel des données, des systèmes de «cloud», reposent également sur les capacités de ces serveurs. Selon certaines estimations, mais sans que cela soit confirmé, une société comme Google possèderait à elle seule entre un et deux millions de serveurs.

Le développement rapide d’internet, notamment la consommation croissante de données via mobile, explique la croissance soutenue de ce secteur ces dernières années. Cela n’est pourtant pas sans conséquences. Aujourd’hui les fermes de serveurs représentent à elles seules 4 à 8% de la consommation électrique mondiale et génèrent 3 à 8% des gaz à effet de serre de la planète, soit autant que le trafic aérien, rapporte le quotidien «Le Parisien». Des données vertigineuses, mais controversées, qui poussent certains spécialistes à soutenir l’idée d’une limitation de la vitesse d’internet pour contenir sa consommation énergétique. La balle est désormais dans le camp des géants du web.

 

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Classé dans en français, Problématiques énergétiques

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