Nous reproduisons ci-après un échange de correspondance informatique entre le représentant du blog de l’APAG2 et celui du blog Biosphère. Le point de vue des écologistes qui publia le 23 février 2018 un article intitulé “Les zadistes à Bure, c’est un combat perdu d’avance”
http://biosphere.blog.lemonde.fr/2018/02/23/les-zadistes-a-bure-cest-un-combat-perdu-davance/
Ivo Rens à Michel Sourrouille (biosphere@ouvaton.org)
16 mars 2018
Bonsoir !
Je suis très affligé de l’article que vous avez publié sous le titre “Les Zadistes à Bure, c’est un combat perdu d’avance”.
D’abord, qu’un combat soit perdu d’avance n’est ni moralement, ni politiquement, un argument responsable.
Le problème du stockage des déchets mérite d’être discuté sérieusement.
Il y a des solutions autrement moins risquées que celles retenues par la nucléocratie française.
En témoigne l’article de Hervé Kempf du 16 février 2018 que j’ai reproduit sur le blog de l’APAG2 :
https://apag2.wordpress.com/2018/02/19/dechets-nucleaires-il-faut-que-letat-cesse-de-mentir/
J’avais publié sur ce même blog, le 12 février 2014, un article qui me semble important de Hans Zumkeller.
Cet article est intitulé “Le projet CIGEO d’enfouissement en profondeur des déchets nucléaires à Bure : Comment l’aventurisme des nucléocrates s’apprête à engager la France dans un désastre sans précédent qui pourrait bien, un jour, être qualifié de crime contre la biosphère”. En voici le lien :
https://apag2.wordpress.com/2014/02/12/cigeo/
Dans cet article une solution nettement moins risquée est esquissée qui consisterait à entreposer ces déchets sous terre, mais dans des falaises qui demeureront accessibles dans les décennies et les siècles à venir, contrairement à l’enfouissement en profondeur à Bure dont les risques sont immenses.
Il me semble que votre blog aurait avantage à dialoguer avec Hervé Kempf et Hans Zumkeller.
Bien cordialement,
Ivo Rens
Professeur honoraire
Université de Genève.
Michel Sourrouille à Ivo Rens
17 mars 2018
Bonjour Ivo
Soucieux de permettre une réflexion approfondie de nos lecteurs, nous avons repris sur notre blog l’argumentaire que tu nous a envoyé :
http://biosphere.blog.lemonde.fr/2018/03/17/pour-une-alternative-a-lenfouissement-a-bure/
Cependant mettre des déchets à très longue vie dans des piscines ou dans des grottes ne dit rien sur les possibilités humaines de maintenance des lieux pendant des centaines d’années. La question reste donc entière : vaut-il mieux des déchets toxiques à 500 mètres sous terre ou à l’air libre pendant une période qui dépasse nos capacités socio-économiques ? Qu’est-ce qui est le plus risqué ?
Bien à toi, Michel Sourrouille
Ivo Rens à Michel Sourrouille
17 mars 2018
Bonjour Michel,
Je pense que vous avez bien fait de placer les deux documents que je vous ai signalés sur votre blog.
Mais ce que vous m’écrivez me paraît indiquer que l’argumentaire développé par Hans Zumkeller ne vous a pas convaincu : Les colis de déchets placés à 500 mètres sous terre ne resteront pas en l’état bien longtemps. Ils surchaufferont, pollueront durablement le sous-sol et réapparaîtront dans les nappes phréatiques, dans les sources et dans la terre arable qui sera durablement affectée d’une contamination radioactive.
Si les autorités françaises avaient écouté l’avertissement solennel que l’Association pour l’Appel de Genève lui avait adressé en 1978 au sujet du SuperPhénix, elles se seraient épargnées le coût de ce surgénérateur géant estimé par la Cour des comptes, en 1997, à 60 milliards de francs français (soit quelque 9,1 milliards d’euros), estimation probablement largement sous-évaluée et ne tenant pas compte du démantèlement toujours en cours de cette installation. Je reconnais toutefois que grâce à l’abandon de ce surgénérateur géant, la France et l’Europe occidentale s’en tirent indemnes sur le plan radiologique !
En présence de pareils risques, la seule position responsable est un refus intransigeant.
Dans les début de l’industrie atomique on se débarrassait des déchets radioactifs n’importe où, en mer, dans les puits de mines abandonnés, voire des décharges sauvages. Cette pratique a heureusement été condamnée au moins pour l’essentiel (reste entre autres les stériles de mines d’uranium…).
Aujourd’hui, et au nom de la loi, on veux s’en débarrasser dans une poubelle creusée à 500m sous terre. Qui peut prétendre que cette poubelle restera étanche pendant les centaines de milliers d’années nécessaires à la désintégration de tous les radioéléments avec tous les mouvements géophysiques possibles, et ceux des eaux souterraines!
Personne n’y croit vraiment, mais l’Etat a besoin de prétendre que la solution est trouvée pour les déchets du nucléaire, et qu’on peut ainsi continuer.
Accepter Cigéo, c’est de fait accepter que le nucléaire continue, quelles qu’en soient les retombées, les catastrophes, les armes qui en bénéficient. C’est perpétuer le crime contre l’humanité.
A mes yeux la bataille de Bure est, maintenant que Notre Dame des Landes est à peu près réglée, la bataille emblématique essentielle non seulement pour l’arrêt du nucléaire, mais aussi contre le modèle de société lié au nucléaire.
Cette bataille est dure car elle touche à l’Etat. Mais elle n’est pas perdue!
Lire à ce sujet « Bure, La bataille du nucléaire », de Gaspard d’Allens, 2017.
Pierre Péguin.