Nucléaire, radioactivité, et santé

par Annie et Pierre Péguin 

décembre 2023 

Le nucléaire est présenté comme une énergie pouvant pallier les hydrocarbures dans la lutte contre le réchauffement climatique. C’est vite oublier les dégâts sur la santé que cette technologie engendre que ce soit dans ses utilisations militaires ou civiles.


Historique

Dès le début de la découverte des rayons x et du radium, les scientifiques sont confrontés au danger : spasmes, pertes de cheveux, graves brûlures et tumeurs. Mais l’énergie qui peut en être tirée et les applications médicales sont étonnantes. En même temps on évoque les propriétés mutagènes et teratogènes des radiations : le Pr Muller les étudie dés 1925 (Il sera reconnu par un prix Nobel en 1946). En 36, à Hambourg on rend hommage à 169 médecins et techniciens morts de « nécrose de tissu ». 

Puis c’est la guerre, le projet Manhattan pour la mise au point de la bombe atomique. L’aménagement d’une région entière consacrée à sa fabrication, en particulier autour de Los Alamos, les scientifiques relèvent déjà l’extrême dangerosité du plutonium, on en injecte même à des cobayes humains. 
Les victimes des bombes d’Hiroshima et Nagasaki, en particulier celles qui agonisent petit à petit sont soigneusement observées par les spécialistes américains.

Les résultats de toutes ces expérimentations ont été censurés, couverts par le secret-défense, il fallait taire les effets à long terme de la radioactivité et éviter que les US soient menacés d’être responsables de crime contre l’humanité. 

Ainsi ces précieuses connaissances ont été perdues pour la protection des travailleurs et des victimes du nucléaire. Les quelques chercheurs qui ont essayé de creuser la question ont été ostracisés ; ceux restant sous la coupe des militaires et du gouvernement sont financés pour justifier l’existence d’une « dose tolérable ».
De plus, n’est pris en compte que l’irradiation externe, pas du tout la contamination interne de l’organisme. Il sera même prétendu que les problèmes de santé induits par la radioactivité sont provoqués par des fantasmes irrationnels pathologiques. 
Au moment de Tchernobyl les experts français vont abuser de cet argument, de même après la catastrophe de Fukushima, la « nucléophobie » est la seule responsable ! Quant aux observations des médecins de terrain elles seront négligées par les structures internationales de sécurité du nucléaire. 

Des événements vont nourrir le doute

– L’Organisation mondiale de la Santé a déclaré en 1957 que « tout rayonnement artificiel doit être considéré comme nocif pour l’homme du point de vue génétique » et que « le bien-être des descendants de la génération actuelle est menacé par l’évolution de l’utilisation de l’énergie nucléaire et des sources de rayonnements ». Aucune preuve scientifique n’est apparue depuis pour contredire cette position. Au contraire, des études ultérieures indiquent que les dangers ont été sous-estimés. Un demi-siècle plus tard, la Terre baigne dans la contamination radioactive. Les activités nucléaires, industrielles et militaires, ont endommagé pour des dizaines de milliers d’années et, irrévocablement, le patrimoine génétique de tout le vivant.

– Dès 1958, Alice Stewart porte à la connaissance de la communauté scientifique le fait que de très faibles doses de rayonnements ionisants sont cancérigènes pour le fœtus pendant la grossesse.

– L’accident atomique de Three MILE Island (1979) vasonner le glas du développementde l’énergie nucléaire pacifique aux EU. 

– D’après la CIPR (Commission Internationale de Protection Radiologique) en 1990
Il n’y a pas de seuil de dose en dessous duquel il n’y a aucun effet. Toute dose de rayonnement comporte un risque cancérigène et génétique. La probabilité d’apparition d’un cancer radio-induit mortel est directement proportionnelle à la dose reçue. 
La CIPR préconise une limite de dose annuelle de 1 mSv/an pour le public, ce qui n’implique pas qu’en dessous les rayonnements soient inoffensifs. La France s’y est conformée tardivement et prévoit de la porter à 20mSv en cas de catastrophe atomique, soit la même valeur que celle autorisée pour les travailleurs du nucléaire.

– Les travaux de Youri Bandazhevsky et Vassili Nesterenko sur la santé des enfants contaminés en Biélorussie (fondation de l’institut Belrad) qui ne sont pas reconnus par les instances internationales. Celles-ci n’admettent que 32 décès directs et 2000 cancers de la thyroïde. La France joue un rôle important pour que soit niée les dégâts de la catastrophe avec le projet Ethos.
Mais une publication de l’Académie des sciences de N.Y. en 2010 fondée sur des travaux scientifiques russes, biélorusses et ukrainiens annonce que Tchernobyl a fait un million de victimes et en fera d’autres puisque les atteinte s génétiques se transmettent. 
Chernobyl: Consequences of the catastrophe for people and the environment.Annals of the NYAS, Vol 1181, Wiley, New York, February 2010.

Les vétérans militaires US ayant subi les retombées des essais nucléaires ainsi que ceux ayant utilisé des armes à tête d’uranium (en Irak par exemple) demandent à être reconnus comme victimes du nucléaire..

Le CERI. Autour des années 2000 la création par le Parlement européen d’un groupe de scientifique le CERI chargé d’étudier les conséquences de la radioactivité en tenant compte de la sensibilité des différents organes et de l’immunité, des effets de la contamination interne (par l’alimentation et la respiration), y compris sous faibles doses, contrairement aux évaluations officielles antérieures qui ne prenaient en compte que l’irradiation directe supérieure aux seuils fixés. 
http://www.dissident-media.org/infonucleaire/millions.html,
D’après le CERI, dès 2003, le nucléaire est responsable de 61,6 millions de morts par cancers depuis 1945, contre 1,1 million selon les sources officielles, le nombre de cancers est pour sa part évalué à 123 millions contre 2,3 et l’étude estime en outre que les radiations ont induit une importante mortalité infantile et foetale (3,4 millions). 

– Les Actes du forum 2014 Scientifique et citoyen sur les effets génétiques des Rayonnements ionisants organisé par le Collectif Independent WHO « Santé et nucléaire » sont publiés.
http://independentwho.org/fr/2015/11/05/actes-forum-2014/

Quelques compléments : 
Lire entre autres :  Kate Brown,  Tchernobyl par la preuve – vivre avec le désastre et après , Actes Sud, 2021. 
– Thiery Gadault et Hugues Demeude,  Nucléaire danger immédiat et Et ça se passera près de chez vous, Flammarion, 2018. 
– Yves Lenoir, La Comédie atomique. L’histoire occultée des dangers des radiations. Editions La Découverte, 2016. 
– Jean-Marc Royer, Le monde comme projet Manhattan, Le Passager Clandestin, 2017. 
De faibles radiations induisent des cancers d’après l’OMS
http://sante.lefigaro.fr/actualite/2015/11/06/24290-faibles-radiations-induisent-cancersUne étude de l’OMS (Organisation mondiale de la santé) sur plus de 300.000 travailleurs de l’industrie nucléaire démontre l’effet néfaste des rayonnements, même à des doses très réduites.Le nucléaire tue… même à faible dose. C’est la conclusion de cette étude scientifique effectuée par des chercheurs espagnols, britanniques, américains et français, dont ceux de l’IRSN (Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire), et coordonnée par le Centre international de recherche sur le cancer à Lyon (CIRC). Travaux publiés par le British Medical Journal (2015).
https://www.bmj.com/content/bmj/351/bmj.h5359.full.pdf
«Notre étude démontre qu’il n’y a pas de seuil minimum en dessous duquel l’exposition aux rayonnements ionisants serait inoffensive», assure le Dr Isabelle Thierry-Chef, du Circ. Plus grave, «même pour des doses comparables à la radioactivité naturelle » complète Ausrele Kesminiene, directrice de recherche au CIRC et coordonnatrice de l’étude. 
L’ampleur de cette étude est sans précédent. Elle porte sur 308.297 travailleurs du nucléaire aux États-Unis, en France et en Grande-Bretagne, entre 1943 et 2005, dont ceux qui ont travaillé dans l’Hexagone pour Areva, EDF et l’IRSN. 

Les mêmes scientifiques avaient effectué une étude épidémiologique sur les risques de leucémie sur la même cohorte de travailleurs du nucléaire, publiée en juillet 2015 par le Lancet Haematology . Ils arrivaient à la même conclusion sur les faibles doses et l’accroissement du risque de décès par leucémie pour les travailleurs du nucléaire. 
«La durée d’apparition et la sensibilité des organes sont différentes. On considère dans les analyses qu’une leucémie peut apparaître deux ans après l’exposition aux rayonnements, et un cancer peut se déclarer dix ans après

Incidence de la radioactivité aux alentours descentrales nucléaires. 
D’après le médecin Michel Fernex,
 il existe une augmentation statistiquement démontrée du nombre de leucémies aiguëes chez les enfants de moins de 5 ans dans un rayon de 5 km autour des centrales nucléaires en fonctionnement normal. Celles-ci sont autorisées à rejeter dans l’air et dans l’eau des particules radioactives qui contaminent durablement la région. 
Suite aux observations recueillies autour de la centrale atomique de Krümmel en Allemagne, et à une pétition avec 10’000 signatures de citoyens inquiets, une étude épidémiologique de grande envergure a alors été initiée autour de 16 centrales atomiques allemandes. Cette étude, publiée en 2007, montre que ces centrales, situées dans des environnements très différents, s’accompagnent d’une augmentation statistiquement significative du nombre de leucémies chez le jeune enfant. 

Après la catastrophe de Tchernobyl 

Tchernobyl reste un désastre : la santé publique continue de se dégrader en Biélorussie victime d’une décision prise dans le secret pour éviter de fortes retombées sur les grandes villes et les industries stratégiques de l’URSS. Pour cela la pluie a été provoquée pour précipiter la radioactivité sur des zones biélorusses.
https://enfants-tchernobyl-belarus.org/etb/documintaire/35ans.html,
L’état général de la population ne cesse de se dégrader. La morbidité chiffrée par le nombre de maladies enregistrées par an et par mille habitants est passée de 300 à 1300. Ainsi toute la population de Biélorussie reste affectée par les séquelles sanitaires de l’accident. Plusieurs millions de personnes vivent dans un environnement dangereux où leur pauvreté (mais aussi leurs traditions culinaires) les pousse à aller chercher une partie non marginale de leur alimentation dans leur voisinage immédiat (lait de vache familiale, produits du potager, champignons, baies et gibier des forêts). 

La descendance de la génération des liquidateurs a été considérablement affectée par l’enrôlement des pères à Tchernobyl. On comptait six fois plus de malformations chez leurs enfants que dans la population générale. A cela il faut ajouter des mortalités péri et néonatale, https://blogs.mediapart.fr/edition/les-invites-de-mediapart/article/250413/tchernobyl-la-mort-des-enfants-en-prime.,
Conséquences génétiques des catastrophes
www.vivre-apres-fukushima.fr/gm-documents/LIVRE_Yablokov.pdf  
A.V.Yablokov V.B.Nesterenko A.V.Nesterenko Saint-Pétersbourg « NAOUKA » 2007, 
On sait qu’à la deuxième et à la troisième génération, chez les enfants de parents survivants irradiés par les bombes atomiques au Japon en 1945, la fréquence des maladies du système lymphatique est 10,5 fois plus élevée, celle des maladies du foie 10 fois et celle du système respiratoire 3,3 fois plus élevée que la moyenne. 

Quant aux descendants des liquidateurs de Tchernobyl ils sont victimes également des altérations chromosomiques qui leur ont été transmises, à l’origine de diverses maladies. 

Cancers de la Thyroïde
L’épidémie de cancers 
de la thyroïde en France , Annie Thébaud-Mony , 2016 Giscop.

Multiplication de ce cancerhttps://www.santepubliquefrance.fr › docs › evolution-de-l-incidence-du-cancer-de-la-thyroide-en-france-metropolitaine.-bilan-sur-25-ans
Le cancer de la thyroïde était relativement rare il y a 25-30 ans, mais le nombre de diagnostics a beaucoup augmenté. 

Les malades de la thyroïde veulent en finir avec l’omerta en France
par Sophie Chapellehttps://basta.media/Tchernobyl-les-malades-de-la-thyroide-veulent-en-finir-avec-l-omerta-en-France
Palpitations, agressivité, prise de poids, fatigue constante, problèmes de libido, dépression, fausse couche… De plus en plus de citoyens français se voient diagnostiquer, après un long parcours médical, un problème thyroïdien. L’Association française des malades de la thyroïde mène un long combat pour faire reconnaître le rôle de la catastrophe de Tchernobyl dans l’augmentation de ces pathologies. 

Info sur les cancers de Thyroïde d’enfants de Fukushima (en anglais)
https://www.sciencerepository.org/area-dose-response-of-prevalent-childhood-thyroid-cancers-after-the-fukushima-nuclear-power-plant-accident_COR-2019-6-116?f

Et que se passerait-il en cas de catastrophe atomique ? 
Rappelons les quatre principales mesures qui suivraient la catastrophe : 

•  L’armée aurait à évacuer rapidement un nombre très important d’habitants, engendrant des flux de population pouvant atteindre plusieurs millions, ce qui est matériellement compliqué et peut-être impossible pour des villes comme Paris, Lyon ou Bordeaux, 

• Relèvement des seuils de contamination admissibles en les multipliant par 20 pour réduire l’évacuation des populations et les laisser vivre dans des zones contaminées, ce qui revient à reporter, dans le temps l’impact sanitaire ainsi durablement augmenté. 

• Mise en zone interdite et/ou hors activité productive d’une partie importante d’un territoire, et ce, pendant des siècles, pour cause de contamination des sols, 

• Mise en place d’une organisation de contrôle autoritaire décrite notamment dans les arrêtés et décrets publiés depuis 2003 sur la gestion de l’accident nucléaire en France. 

Quant aux conséquences sanitaires, malgré leurs dilutions dans le temps, le secret qui les entoure a toujours permis de minorer le nombre officiel de victimes, elles seraient d’une ampleur sans précédent pour notre pays. Les décès plus ou moins rapides s’accompagnerait de maladies pour un grand nombre, et de malformations pour les descendants. 

Et pour finir : Chacun de nous peut observer la multiplication de cancers depuis quelques dizaines d’années, et le développement de maladies rares. Ces effets des changements de notre environnement ne sont pas seulement dus à la chimie (pesticides de synthèse, plastiques), ou aux pollutions et aux ondes, mais aussi à la contamination radioactive généralisée.
Mais spécificité française, tout est fait pour cacher les effets de la radioactivité afin d’éviter que la population ne remette en cause l’armement atomique et l’électronucléaire…



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